ACTIVITES
DE RECHERCHE
MOTS CLES : Planètes telluriques, planétologie comparée,
Mars, Vénus, exoplanètes, atmosphère, habitabilité, volcanisme,
géodynamique, modélisation, échappement atmosphérique.
1. Avant la thèse
Mon premier stage de recherche, au cours de ma maîtrise de
sciences de la Terre à l’ENS de Paris (Magistère I, 2003) avait
pour objet la modélisation de la rupture de la plaque plongeante lors de
la subduction menant à la formation d’adakites. Ce stage ( à
l’université de Nantes) sous la direction des professeurs C. Sotin et O.
Grasset. Ce premier stage m’a permis d’acquérir des connaissances de
base sur la modélisation numérique.
J’ai rapidement réalisé que mon véritable centre d’intérêt se situait
plus dans l’étude des autres planètes, avec un stage de master I au
DLR de Berlin (2004) sous la direction des professeurs D. Breuer et
T. Spohn sur la convection interne des satellites des géantes gazeuses
et la génération d’un champ magnétique par Titan.
En master II, (2005) j’ai effectué mon stage à l’IPGP sous
la direction du professeur P. Lognonné sur le couplage
atmosphère/intérieur des planètes telluriques. Cette expérience a
directement inspiré mon sujet de thèse et a servi de base à une partie
des recherches au cours de celle-ci.
2. Pendant la thèse
Ma thèse (2005-2009), réalisée à l’IPGP sous la direction des professeurs
P. Lognonné et E. Chassefière est intitulée « Habitabilité à long terme
des planètes telluriques ». Elle a été financée par une bourse MENRT,
complétée par plusieurs demandes de financement au PNP (Programme
National de Planétologie) et un financement HPC-Europa (2009).
Cette thèse, suivant une approche multidisciplinaire, m’a permis de
développer des scénarios d’évolution cohérents pour deux planètes de
notre système solaire : Mars et Vénus. Ces travaux ont d’ailleurs mené à
trois publications (Gillmann et al., 2009a, 2009b ; van Thienen et al.,
2007) chez EPSL et Space Science Review.
Les premiers résultats obtenus concernent Mars
(Gillmann et al., 2009a). Cette étude propose de modéliser l’évolution
des espèces importantes de l’atmosphère de la planète (CO2) d’après
l’échappement atmosphérique (les interactions entre le flux extrême UV
et les molécules de la haute atmosphère estimées par des modèles et par
des instruments –ASPERA ; Lundin et al., 2009) et le dégazage volcanique
au cours des trois derniers milliards d’années (Breuer et Spohn, 2006).
Nous concluons que le CO2 de l’atmosphère martienne actuelle serait
jeune et produit en grande partie par le volcanisme tardif de la
planète.
La seconde partie de mon travail de thèse se consacrait à Vénus
(Gillmann et al., 2009b) et à l’étude de la période primitive de son
évolution (0-500 Millions d’années). Le but de cette étude était de
proposer un scénario cohérent des premières centaines de millions
d’années de l’évolution de cette planète, une phase cruciale où
plusieurs mécanismes complexes tels que l’océan de magma ou
l’échappement hydrodynamique sont impliqués. Le travail a porté
principalement sur la quantification des effets de l’échappement
primitif (Zanhle et Kasting, 1986 ; Hunten et al., 1987 ; Chassefière,
1996). Nous obtenons des simulations reproduisant le fractionnement
isotopique des gaz rares mesuré pour Vénus et la Terre. Enfin nous
proposons un scénario cohérent expliquant les données isotopiques et
prenant en compte les évènements probables de l’évolution primitive de
Vénus. Nous soulevons l’hypothèse d’une phase d’atmosphère d’oxygène
abiotique transitoire, qui pourrait constituer un faux-positif dans
l’identification de la vie extra-solaire.
3. Après la thèse
Après ma thèse, j’ai eu l’opportunité d’effectuer un an d’ATER
(2009-2010) à l’IPGP, ce qui m’a permis d’enseigner et de poursuivre mes
projets de recherche. En particulier, j’ai poursuivi mon travail sur
Mars en perfectionnant le modèle en étendant la période et les
espèces étudiées (eau, l’azote et l’argon). J’ai enfin inclus les
résultats des dernières études géochimiques (Hirschmann et al., 2008) et
isotopiques ainsi que les contraintes observationnelles de la surface de
Mars (Greeley et Schneid, 1991). Mes résultats indiquent l’importance du
volcanisme dans l’évolution de l’atmosphère martienne au niveau
isotopique (Niles et al., 2010), ou à celui de la quantité d’eau à la
surface de la planète. L’atmosphère actuelle de Mars possède un âge
moyen de 2 Ga. Enfin, l’eau présente à la surface et observée au niveau
des calottes sous forme solide (Bibring et al., 2005) proviendrait en
grande partie du volcanisme. Les variations de pression et de
température (Forget et al., 1999) sont néanmoins insuffisantes pour
garantir l’existence de l’eau liquide ou de conditions d’habitabilité
pendant les 3,5 à 4 derniers milliards d’années.
A l’ETHZ (2010-2012), j’ai obtenu une Fellowship sous la direction
du professeur P. Tackley. J’y ai étudié la relation entre dynamique
planétaire et habitabilité. Pour cela, j’ai adapté le code StagYY
développé par le Professeur P. Tackley depuis plus de 15 ans (Tackley,
1993 ; 2008). Ce code inclut de nombreuses fonctions essentielles pour
modéliser de façon réaliste l’évolution des manteaux planétaires, telles
que les zones de transition chimique, la fusion partielle, la
compressibilité etc. Les échanges d’espèces volatiles peuvent ainsi être
modélisées. La partie atmosphérique du code consiste en un modèle
d’atmosphère grise radiative-convective (Phillips et al., 2001), combiné
avec une étude de l’échappement atmosphérique. Nous appliquons notre
modèle à Vénus dont nous reproduisons le comportement volcanique
épisodique (Nimmo et McKenzie, 1998). Ces épisodes volcaniques ont un
impact direct sur les températures de surface qui augmentent avec
l’ajout d’eau dans l’atmosphère sèche de Vénus, ce qui nous permet
d’étudier le couplage atmosphère/dynamique interne. Ainsi, nous mettons
en évidence le fort couplage qui lie l’atmosphère et le manteau de
Vénus, associant un régime de convection de type couvercle mobile
(proche de la tectonique des plaques) aux périodes où la surface est
plus froide, tandis que les périodes chaudes sont liées à un couvercle
stagnant (Gillmann et Tackley, 2014).
A l’ORB (2012-2017), Je suis membre du programme PlanetTOPERS,
destiné à étudier l’évolution des planètes et de leur habitabilité,
ainsi que du groupe ACCRETE destiné à étudier les origines du système
solaire. Dans ce cadre, je me suis concentré sur l’influence des impacts
météoritiques sur l’évolution des planètes telluriques. Les planètes
telluriques ont toutes connu de nombreux impacts de tailles très
variables. Ces impacts peuvent avoir trois effets majeurs : ils peuvent
(i) éroder l’atmosphère en permettant son échappement, (ii) apporter de
nouvelles espèces (en particulier volatiles) à la planète et (iii)
déposer une grande quantité d’énergie dans la partie solide de la
planète sous forme de chaleur. Nous incluons ces trois aspects dans
notre modèle global couplé d’évolution de l’atmosphère et du manteau de
Vénus (Gillmann et al., 2016). En particulier nous mettons en évidence
le peu de conséquences que l’érosion due aux grands impacts peut avoir
sur une atmosphère planétaire de type vénusien. Nous démontrons aussi
que ces impacts peuvent en revanche affecter profondément la convection
mantellique, à la fois directement (par l’anomalie thermique qu’ils
génèrent) et sur le long terme (de par les modifications des conditions
de surfaces qu’ils impliquent). Enfin, nous soulignons que ces impacts
sont susceptibles d’appauvrir considérablement le manteau de la planète
en raison de la grande quantité de fusion partielle qu’ils provoquent.
Nous continuons nos investigations en nous concentrant sur la phase la
plus précoce de l’évolution des planètes telluriques : la fin de
l’accrétion. Cette période, où l’essentiel de la planète est déjà formé,
voit se décider ses caractéristiques principales comme la mise en place
de son atmosphère et son budget total en espèces volatiles, dont on
estime qu’il est primordial pour son évolution future (convection,
dégazage, échappement). Cette période est aussi essentielle pour les
modèles car les conditions initiales déterminent directement la validité
des résultats obtenus. Pour nous pencher sur l’étude de ces conditions
nous suivons trois pistes :
(i) l’amélioration de notre modèle global pour qu’il puisse prendre en
compte les nuées de petits impacteurs précédemment ignorés. L’action
conjointe de cette multitude d’impacts pourrait éroder l’atmosphère
efficacement.
(ii) La prise en compte de l’effet thermique de surface des impacts, en
particulier dans le cas de Mars, afin de déterminer si ces impacts
peuvent assurer l’existence d’eau liquide en surface de la planète au
cours du premier milliard d’années.
(iii) L’étude du contenu en volatiles des météorites et comètes qui
apportent leur contribution à la fabrication des planètes telluriques,
en particulier en considérant leur trajet depuis l’état d’embryons dans
le système solaire extérieur et les phénomènes (échappement
hydrodynamique) auxquels ils sont soumis.
Mes projets futurs incluent deux axes d’étude principaux. Le
premier concerne le développement de la modélisation atmosphérique des
planètes de façon à représenter plus précisément les processus qui ont
lieu en leur sein. Une première étape consisterait en l’inclusion d’un
code tel que celui de Robinson and Catling (2012), très versatile, et
qui a prouvé qu’il pouvait s’adapter à de nombreux types de planètes.
Ainsi nous pourrions obtenir un profil vertical 1D complet de
l’atmosphère étudiée plutôt qu’un bilan global de son contenu. Un tel
modèle permettrait de s’intéresser à la photochimie de l’atmosphère et
pourrait être comparé aux observations. Il permettrait aussi une
meilleure compréhension des conditions de surface et de l’habitabilité.
De tels modèles ont été réalisés, en particulier pour Vénus (Kasting et
Pollack, 1983 et suivants ; Kopparapur et al (2013)), qui constituerait
un terrain de test approprié, mais le couplage avec la partie dynamique
n’a pas été réalisé et peut avoir d’importantes conséquences, comme
l’indiquent nos travaux.
Le second axe se concentre sur l’application des résultats obtenus aux
exemples d’exoplanètes disponibles. En effet, à présent, nous sommes
capables de détecter des exoplanètes telluriques de taille similaire à
la Terre, ce qui offre des possibilités exaltantes tant au niveau de la
modélisation que de l’observation. En effet nous souhaitons orienter nos
recherches vers la sélection de critères qui pourront, dans un futur
proche être comparés aux relevés effectués sur ces exoplanètes.
Concrètement, cela signifie s’intéresser aux conséquences des événements
de l’évolution de la planète sur l’atmosphère. En effet, il s’agira sans
doute des premières données accessibles en dehors des simples paramètres
orbitaux.
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